mercredi, mai 30, 2007

< Chemin morte tendre exil 3 >

Mon coeur quoiqu'il arrive bat trop vite. Prendre de vitesse le monde et tous les êtres, et rester immobile. Je m'enfonce déprimé dans l'insensibilité du travailleur gratuit, plus que nerfs et réflexes, maux de dos et de jambes, de coeur et de poumons, tout entier putréfaction et maux, pour rien.
Léger humain porté par les souffles de l'instant et de l'environnement. Clochard déprimé dans les lieux sédentaires pendant que la panique sourde monte. Oiseau léger rêveur, naissance d'un horizon, en passage en des lieux, porté par des transports. Travailleur incarné, aliéné haine de soi, mais presque heureux parfois, en période de salaires. Lourde et vibrante machine en marche, des fusées dans le crâne, au milieu des bouquins, tempêtes puissantes quand l'électrique cerveau ne parvient qu'à peine à maîtriser les emballements cardiaques.
Parfait hérisson, ou est-ce petit bourgeois, moi moi moi, moi moi moi, handicapé des épines, suffoque ou meurt de froid. L'horreur de tout un monde. Des sortes de rats agglutinés en communautés gloutonnes et des individus laissés à eux-mêmes, comme des rois, comme des parias, aucune juste mesure, incapacité de chacun et de tous à tisser relation ensemble. Ensemble, ensemble, c'est le mot de ce monde, des petits ensembles, voilà leur taille humaine. Rebus de ce monde lorsqu'un beau jour décidai de m'extraire de cette fange, commune, trop commune, pour entrer dans les livres. Et puis solitude et culpabilité, et des liens pour survivre. Seuls ces liens. Des ensembles minimums où s'accrocher, abandonnant tout goût. Est-ce là, après plusieurs années, alors même qu'en passage, qu'elle survint ?
Si l'on tombe, c'est bien que l'on s'accroche. Peur de tomber sans fin en cas de lâche-ammares. Lorsque l'on marche, qu'en a-t-on à faire d'elles ? Le monde prend forme autour de nous, en nous, et nous en lui, les horizons possibles s'élèvent, les rêves s'élaborent, en sourire nous rencontrons les humains, et frayons avec eux, notre vie prend corps, notre corps porte les stigmates du monde, et — et non, pas ça ! Pas ÇA, crie quelque part en nous une voix. Nous la faisons crier de force car elle chuchote et s'exprime en un souffle las de peur de ne plus s'entendre.
Il y a tant et tant à dire lorsque l'on ne bouge pas, pourtant non immobile. Un résumé très court : c'est la mort qui s'installe. Un point où je peux dire, avec un peu d'espoir : tout ce que je pense et dis vaut par performation ; mais la seule performation est ma parole aphone enfoncée dans le divan.
Lorsque l'on fuit on s'égare des champs sémantiques censés nous contenir, censés nous définir. Et croyez-vous que c'était pour faire joli, l'emmaillotement, cette analogie en coulisses ? Nous sommes des hommes libres, démmaillotés depuis toujours, sans même une consigne automatique pour nous apprendre à étouffer, pas même jetés. Non contenus et non définis, à nous le travail. Non mais quelle chance ! Les clés du mécanisme ont bien du être insérées quelque part. Exercice pour le prochain cours : isoler des champs sémantiques, s'y promener comme un aimant.
Chercher des repères autour de soi, de quoi rêver un peu. Sonder par une matière quelconque qui s'écoule hors de nous, jusqu'à trouver des repères, de quoi rêver un peu. De quoi faire. Pour beaucoup cette matière n'est pas banalement corporelle. Avec un peu de chance ces repères trouvent à s'inscrire plus ou moins dans le monde, et nous permettent de vivre. Ah quand nous savons où vivre tout cela est bien plus simple, mais nous avons tué le destin.

< Chemin morte tendre exil 2 >

Une pièce blanche. Une grande salle de musée dans un blockhaus quelconque. Un endroit lumineux sous quelques hallogènes. Un blanc mat comme une falaise de craie. Rester à l'entrée. Imaginer ce qu'il pourrait advenir là. Imaginer le geste. Le pas. Le regard. L'oreille. Imaginer le corps de qui entrerait là. De qui se tiendrait là.

Chemin morte, tendre exil, les siècles s'amoindrissent de quelques zigotos. De gamins en partance, de rigoles en descentes. Des corps tannés, pongés, risqués au crépuscule, amollis au reflux de mains trop carressantes. Des bontons et des plaques, des effluves et des flaques. Les jeunes filles se ramassent en cadavres muants, serpents de salles de bains, peaux moites et odorantes.

Un cadre tinte, en chemin de sa place. Des mains expertes le font se balancer, les jambes désarçonnées, lourdes et les bras balants. Son dos brun pâle recèle un numéro de crayon rouge. Bords noirs cerclant le faire-part apporté. L'homme ne trébuche pas, son assurance vacillante est garante de son ancrage terrien, les voiles menant vers l'inconnu, messager des lieux clos.

Je peine à percevoir la moindre imperfection sur ta peau granulée. Ton territoire connu, terres sacrées, surface ouverte à tous, cachée et bien trop chère. La perfection ouvre sur l'immensité, aspire les humains comme des mouches perdues. Triste fascination sans lendemain, la mélancolie des nostalgiques de ce qu'ils n'ont jamais eu.

Des corps laboratoires. Trois corps dieux et humains, images matières en stock dans l'usine des instruments de capture. L'infini d'un seul corps en vingt mètres carrés. Musique comme japonaise, des tensions et des souffles, des surprises et des pauses, les coincidentia oppositorum alignés successifs dans la ligne musicale. Elle teinte la pièce plongée dans l'ombre elle est caveau. Et les conditions changent, suivant les heures du jour. Tout ce que l'on peut faire dire à un corps. Parvenir à l'aimer.

La soudaineté de la pelle du bulldozer à travers le plafond. Occupe la moitié de la pièce. Se relève et revient. Intervales réguliers qui régulent la panique. Lents et certains et lourds. Accrochent toujours un petit bout de plafond, démolition totale, un art à l'état brut. Les photographies se perdent dans la brume, les étendoirs peut-être tombés. Les corps morts mis au jour, détiennent leur vérité dans la lumière soudaine, profanation naissance.

Peau contre peau. Nous sommes lourds et pâteaux, notre chair maigre est flasque. Bruyants en chuchotant. Sereins dans le silence et le repos des corps. Nulle question de musique envoûtante. L'horreur de ces énergumènes se promenant en musées se demandant où ils sont. Qu'est-ce qu'ils voient. Ce qu'ils doivent en penser. Déploiement naturel des corps à l'écoute. Trois colonnes en triangle équilatéral. Autour, des fées, des fantômes flottants à l'écoute tête penchée.

Epuration des rapports d'étrangeté. La médiation de l'art. On ne peut pas laisser les choses sérieuses aux humains, aux rapports interpersonnels de la plupart d'entre eux. Et des médiations techniques dans ces rapports quand il ne s'agit pas d'ouvrir sur un inconnu. Jusqu'au grotesque et aux armes. Maîtrise de la culture. Mais qui cela concerne ?

< Chemin morte tendre exil 1 >

Chemin morte tendre exil au soleil hispanique d’ivoire sablé morte en chemin qu’elle d’une anse perdue d’avance au creux des reins filous. Une chevaline esquisse d’abrutis en pâture lui valut d’hisser l’ire aux blêmissants ventrus. Georges n’y cru point d’un as qu’il ira au soleil se dorer l’espadon. Mortel ennui très cher, mortel désespoir en noires flaques effaçables. Giboulées d’hivernale très à quatre feuille sali rougeoyant d’anémone et crevure sibyllin. Argentique espoir seul qui m’avait permis l’hydre au chevet d’une taupe attraper les cinq mains.
Ainsi passèrent les jours et l’ivoire amoindri chercha à quatre têtes se hisser au gratin. J’ai toujours par chez moi une gigantesque tête au mur de morte chasse. J’ai toujours au creux d’un mortel espadon grec cherchant l’Annapurna. Elle avait cru un jour pouvoir m’attraper sec et me rejeter bien comme un vieux raisin sec. Elle avait cru un jour se passer de mes bras et cracher son amour à l’aide d’un bazooka. J’ai toujours au pain sec un cœur renfermé dru qui s’excite en ses aises.
Acrimonie salée qu’il a plus tôt perdu son objet rétractile.