dimanche, juillet 22, 2018
dimanche, mars 01, 2009
< Morts sans tombes, danse macabre >
Extinction d'un possible
Mort sans tombe, poubelle ouverte
Première
Ce n'était - pas le moment
Pas le moment, pas le moment
Nous ne - pouvions pas
Pas d'argent
Pas la place, pas de confiance, pas d'intime
Son amour est parti, elle ne va pas rester
Rester - toute seule
Mais pas toute seule, elle n'est pas toute seule
Se sent toute seule depuis
Depuis des mois
Elle - je - nous
Nous
Porte de cimetière ouverte, il ne faut pas
Il faut fermer ces portes, des jeunes pourraient profaner les tombes
Absence de tombe, l'amour est un cimetière
Cimetière depuis la tombe
Tombe arrachée, haute lutte
Cimetière maintenant, une tombe
Sans tombe, poubelle
Elle - je - nous
Cimetière
Pas rester
Ce petit cristal
De nous
A la poubelle
Ce petit bout
De nous
Au cimetière
Ce grand amour
De nous
Porte fermée, porte ouverte
Pleurs cris violence indifférence et meurtre
Affects évaporés, on oublie
Pas de mots
Des jeunes pourraient profaner
Solitude
Noirceur
Doigts qui ne s'étendent pas
Regards ailleurs
Des peaux lointaines
Des élans au-dedans
Au-dedans, au-dedans, au-dedans
Retrouver, perdre, tuer, jeter
Liquidation d'une possibilité, première
Caméra noir et blanc, fouille les creux
Ça bouge, ça vit, ça meurt
À liquider, à jeter, pas de mots, pas de mots, pas de signes, pas de sens
Liquidation des creux de vie, des poches d'amour
Désert, cimetière, champ de ruines, champ de ruines - évaporées poussière
Eros et thanatos néant, liquidation totale sans flux, tout part à des vitesses extrêmes
Aspiration des creux poubelle
Il n'y a rien à voir
Quels sont ces corps rompus sur le rivage
Défaits dans le sommeil, abrutis de travail
Hier encore petits sourires yeux tristes, "je te considère comme mon meilleur ami"
Éclatement des bulles de savon
Rayer les masques, secouer les arbres plantés dans l'existence
Interroger les brins d'herbe que nous sommes
Prendre la mesure du vent
Quels sont ces corps rompus sur le rivage
En des postures bizarres
Desséchés bouche ouverte le vent le sable du désert emporte leur peau leur chair, leurs os s'offrent aux bédouins, la traversée est rude
Le choc est fort, la mort est là
Tabula rasa, terre brûlée, ne s'est-il rien passé
Affects offerts à l'usine et infusés dans le sable du désert
Dans la poubelle plus qu'un lambeau de sang
Lancinantes mélodies face à un ciel désert
"Je ne rêve plus, je ne fais que pleurer, comme une malade mentale qu'on n'aurait pas soigné"
Des corps recroquevillés qui cherchent dans leurs entrailles une étincelle de vie
Une mèche de bougie éteinte
Vie à mourir, vie à venir, une vie quelconque qui sourd
Un peu de vie qui reste
Sur un rivage non-humain des corps recroquevillés
Rejetés par les vagues
À l'âme, dernières amies, étranges
Silence dans la salle
Les corps
Évidés
Pourront-ils se mouvoir
Écroulés sur la scène
La salle est vide, lumières éteintes
Des larmes sèches courent jusque dans les coins de ses rondeurs
La porte de ce cimetière se ferme
Mouvements ?
Tombe ?
Des flux secs parcourant la poubelle ?
L'évènement assourdissant trouvera-t-il sa transe ?
L'évènement assourdissant sera-t-il entendu
Ou la poubelle trônera-t-elle triomphante ?
Quelle est la force de ces corps liquidés ?
Extinction d'un possible, mort sans tombe
Poubelle ouverte, évènement insondable
Première et deux jours
D'un mort mort-jeté
"A trop penser, on s'enlise
Et on devient vite
Suicidaire"
Quel est
Quel est ce petit nœud
Sourd et fort
Mèche d'une bougie d'une bombe de cheveux allumée dans le vent menacée par la cire
Qui se noue en mon fond et me tue et m'étrangle
Extrémités tremblantes
Cœur qui se serre, cœur qui vit
Épuisement, mon cœur
Petit nœud qui m'accroche
mardi, janvier 06, 2009
Charles Bukowski, Le génie de la foule
Le génie de la foule
il y a assez de traîtrise, d'haineuse violence absurde dans l'être humain moyen
pour fournir n'importe quelle armée à n'importe quel moment
et les plus doués pour le meurtre sont ceux qui revendiquent contre lui
et les plus doués pour la haine sont qui revendiquent l'amour
et les plus doués pour la guerre sont ceux qui revendiquent la paix
ceux qui revendiquent Dieu, ont besoin de Dieu
ceux qui revendiquent la paix n'ont pas la paix
ceux qui revendiquent l'amour n'ont pas l'amour
méfies-toi des revendicateurs
médies-toi des savants
méfies-toi de ceux qui lisent tout le temps des livres
méfies-toi de ceux qui détestent la pauvreté
ou en sont fiers
méfies-toi de ceux qui louent rapidement
car ils ont besoin de louanges en retour
méfies-toi de ceux qui censurent rapidement
ils ont peur de ce qu'ils ne connaissent pas
méfies-toi de ceux qui recherchent toujours la foule
ils ne sont rien tous seuls
méfies-toi de l'homme moyen de la femme moyenne
méfies-toi de leur amour, leur amour est moyen
recherche la moyenne
mais il y a du génie dans leur haine
il y a assez de génie dans leur haine pour te tuer
pour tuer n'importe qui
ne voulant pas la solitude
ne comprenant pas la solitude
ils essaieront de tout détruire
ce qui diffère d'eux-mêmes
n'étant pas capable de créer de l'art
ils ne comprendront pas l'art
ils considèreront leur ratage comme créateurs
seulement comme un ratage du monde
n'étant pas capable d'aimer pleinement
ils croiront ton amour incomplet
et ensuite ils te détesteront
et leur haine sera parfaite
comme un diamant brillant
comme un poignard
comme une montagne
comme un tigre
comme la ciguë
leur plus grand art
mercredi, mai 30, 2007
< Chemin morte tendre exil 3 >
Léger humain porté par les souffles de l'instant et de l'environnement. Clochard déprimé dans les lieux sédentaires pendant que la panique sourde monte. Oiseau léger rêveur, naissance d'un horizon, en passage en des lieux, porté par des transports. Travailleur incarné, aliéné haine de soi, mais presque heureux parfois, en période de salaires. Lourde et vibrante machine en marche, des fusées dans le crâne, au milieu des bouquins, tempêtes puissantes quand l'électrique cerveau ne parvient qu'à peine à maîtriser les emballements cardiaques.
Parfait hérisson, ou est-ce petit bourgeois, moi moi moi, moi moi moi, handicapé des épines, suffoque ou meurt de froid. L'horreur de tout un monde. Des sortes de rats agglutinés en communautés gloutonnes et des individus laissés à eux-mêmes, comme des rois, comme des parias, aucune juste mesure, incapacité de chacun et de tous à tisser relation ensemble. Ensemble, ensemble, c'est le mot de ce monde, des petits ensembles, voilà leur taille humaine. Rebus de ce monde lorsqu'un beau jour décidai de m'extraire de cette fange, commune, trop commune, pour entrer dans les livres. Et puis solitude et culpabilité, et des liens pour survivre. Seuls ces liens. Des ensembles minimums où s'accrocher, abandonnant tout goût. Est-ce là, après plusieurs années, alors même qu'en passage, qu'elle survint ?
Si l'on tombe, c'est bien que l'on s'accroche. Peur de tomber sans fin en cas de lâche-ammares. Lorsque l'on marche, qu'en a-t-on à faire d'elles ? Le monde prend forme autour de nous, en nous, et nous en lui, les horizons possibles s'élèvent, les rêves s'élaborent, en sourire nous rencontrons les humains, et frayons avec eux, notre vie prend corps, notre corps porte les stigmates du monde, et — et non, pas ça ! Pas ÇA, crie quelque part en nous une voix. Nous la faisons crier de force car elle chuchote et s'exprime en un souffle las de peur de ne plus s'entendre.
Il y a tant et tant à dire lorsque l'on ne bouge pas, pourtant non immobile. Un résumé très court : c'est la mort qui s'installe. Un point où je peux dire, avec un peu d'espoir : tout ce que je pense et dis vaut par performation ; mais la seule performation est ma parole aphone enfoncée dans le divan.
Lorsque l'on fuit on s'égare des champs sémantiques censés nous contenir, censés nous définir. Et croyez-vous que c'était pour faire joli, l'emmaillotement, cette analogie en coulisses ? Nous sommes des hommes libres, démmaillotés depuis toujours, sans même une consigne automatique pour nous apprendre à étouffer, pas même jetés. Non contenus et non définis, à nous le travail. Non mais quelle chance ! Les clés du mécanisme ont bien du être insérées quelque part. Exercice pour le prochain cours : isoler des champs sémantiques, s'y promener comme un aimant.
Chercher des repères autour de soi, de quoi rêver un peu. Sonder par une matière quelconque qui s'écoule hors de nous, jusqu'à trouver des repères, de quoi rêver un peu. De quoi faire. Pour beaucoup cette matière n'est pas banalement corporelle. Avec un peu de chance ces repères trouvent à s'inscrire plus ou moins dans le monde, et nous permettent de vivre. Ah quand nous savons où vivre tout cela est bien plus simple, mais nous avons tué le destin.
< Chemin morte tendre exil 2 >
Chemin morte, tendre exil, les siècles s'amoindrissent de quelques zigotos. De gamins en partance, de rigoles en descentes. Des corps tannés, pongés, risqués au crépuscule, amollis au reflux de mains trop carressantes. Des bontons et des plaques, des effluves et des flaques. Les jeunes filles se ramassent en cadavres muants, serpents de salles de bains, peaux moites et odorantes.
Un cadre tinte, en chemin de sa place. Des mains expertes le font se balancer, les jambes désarçonnées, lourdes et les bras balants. Son dos brun pâle recèle un numéro de crayon rouge. Bords noirs cerclant le faire-part apporté. L'homme ne trébuche pas, son assurance vacillante est garante de son ancrage terrien, les voiles menant vers l'inconnu, messager des lieux clos.
Je peine à percevoir la moindre imperfection sur ta peau granulée. Ton territoire connu, terres sacrées, surface ouverte à tous, cachée et bien trop chère. La perfection ouvre sur l'immensité, aspire les humains comme des mouches perdues. Triste fascination sans lendemain, la mélancolie des nostalgiques de ce qu'ils n'ont jamais eu.
Des corps laboratoires. Trois corps dieux et humains, images matières en stock dans l'usine des instruments de capture. L'infini d'un seul corps en vingt mètres carrés. Musique comme japonaise, des tensions et des souffles, des surprises et des pauses, les coincidentia oppositorum alignés successifs dans la ligne musicale. Elle teinte la pièce plongée dans l'ombre elle est caveau. Et les conditions changent, suivant les heures du jour. Tout ce que l'on peut faire dire à un corps. Parvenir à l'aimer.
La soudaineté de la pelle du bulldozer à travers le plafond. Occupe la moitié de la pièce. Se relève et revient. Intervales réguliers qui régulent la panique. Lents et certains et lourds. Accrochent toujours un petit bout de plafond, démolition totale, un art à l'état brut. Les photographies se perdent dans la brume, les étendoirs peut-être tombés. Les corps morts mis au jour, détiennent leur vérité dans la lumière soudaine, profanation naissance.
Peau contre peau. Nous sommes lourds et pâteaux, notre chair maigre est flasque. Bruyants en chuchotant. Sereins dans le silence et le repos des corps. Nulle question de musique envoûtante. L'horreur de ces énergumènes se promenant en musées se demandant où ils sont. Qu'est-ce qu'ils voient. Ce qu'ils doivent en penser. Déploiement naturel des corps à l'écoute. Trois colonnes en triangle équilatéral. Autour, des fées, des fantômes flottants à l'écoute tête penchée.
Epuration des rapports d'étrangeté. La médiation de l'art. On ne peut pas laisser les choses sérieuses aux humains, aux rapports interpersonnels de la plupart d'entre eux. Et des médiations techniques dans ces rapports quand il ne s'agit pas d'ouvrir sur un inconnu. Jusqu'au grotesque et aux armes. Maîtrise de la culture. Mais qui cela concerne ?
< Chemin morte tendre exil 1 >
Ainsi passèrent les jours et l’ivoire amoindri chercha à quatre têtes se hisser au gratin. J’ai toujours par chez moi une gigantesque tête au mur de morte chasse. J’ai toujours au creux d’un mortel espadon grec cherchant l’Annapurna. Elle avait cru un jour pouvoir m’attraper sec et me rejeter bien comme un vieux raisin sec. Elle avait cru un jour se passer de mes bras et cracher son amour à l’aide d’un bazooka. J’ai toujours au pain sec un cœur renfermé dru qui s’excite en ses aises.
Acrimonie salée qu’il a plus tôt perdu son objet rétractile.