samedi, mars 11, 2006

< la fée bleue >

Il était une fois une fée bleue au pays des endives. Son père le roi lui avait offert une bague en un cadeau frivole lors du passage d’une troupe de gitans. La fée conservait la bague comme le cadeau le plus cher qu’elle eût jamais reçu. Elle lisait la promesse de son avenir dans cette bague en plastique, et rêvait doucement chaque nuit dans ses draps blancs soyeux la bague dans la main refermée sur son cœur.
Or le roi n’avait aucun pouvoir, que là pour parader, bénéficiant du respect amusé de chacun. Le château était beau, il était riche et confortable, mais rien ne s’y passait. La fée rencontrait parfois la reine sa mère, au détour d’un couloir, quand elle venait chercher du sel dans les appartements du roi, ou pour lui demander de bien vouloir réparer son lavabo qui fuit. Elles échangeaient quelques amabilités rapides, la fée s’étonnant de ressembler tant à cette femme libérée.
La fée grandit ainsi jusqu’à ses dix-huit ans, rêvant au prince charmant et ne fît point d’études. Le lendemain matin de son anniversaire, son père entra dans sa chambre, la réveilla doucement. Il lui parla en ces termes : « ma fille, je vais t’emmener en ville. Tu vas découvrir la vie. Je vais t’emmener dans un lieu qui t’apprendras la vie. Tu resteras en ce lieu sept années durant, et si tu le souhaites, tu pourras rester quelques années de plus. Ma fille, tu dois oublier tout ce que tu as appris jusqu’à présent. La vie pour toi commence en ce jour. Nous ne nous reverrons plus, ma chérie. Sache dès à présent que je t’aime. » La fée répondit : « j’ai toujours eu foi en vous, mon père. Quoi que vous m’indiquiez, j’irai. »
Le roi emmena à la ville la fée bleue, qui ne connaissait que le château et la place du village. Il arrêta la voiture le long d’un quai et sonna à une porte. « Monsieur ? — Bonjour madame, c’est moi qui ai appelé ce matin. C’est pour ma fille. — Ah oui. Est-elle là ? — Oui, dans la voiture. — Très bien. Amenez-la donc. » Le roi amena sa fille à la dame. Celle-ci s’exclama dans une longue plainte qu’elle ne contrôla pas à la vue de la beauté indescriptible de la fée bleue. Lorsque le son se tue en sa gorge, elle lui dit « mais entre donc » et ferma la porte en oubliant le père.
La femme enferma la fée dans une chambre, lui apporta un verre d’eau et une assiette de pâtes, et l’oublia le reste de la journée. La fée n’osait sortir, se rappelant sans cesse le visage fermé et dur de son hôte la dernière fois qu’elle entrît. Son sang circulait à torrent dans ses veines, l’empêchant d’immobilité, et parfois elle s’écroulait sur son lit abandonnée au temps. Quelques heures de ce cirque et au lieu d’être atteinte d’une rage de la ville qui l’aurait jetée dans le ressentiment, la fée bleue s’abrutit dans l’ennui en se rappelant le château.
À la nuit tombée la femme son hôte vint ouvrir la porte de la chambre. Elle tendit le bras, main ouverte. La fée resta interdite un instant avant de venir. La femme saisit son bras d’une poigne ferme et l’emmena d’un pas décidé à travers un couloir. Quelques portes et quelques couloirs plus loin, la femme arrêta la fée devant une grande porte en métal. La fée serrait la bague dans sa paume comme jamais encore dans sa vie, car elle sentait que sa vie dont lui avait parlé son père débutait derrière cette porte. « Es-tu prête ? Lui demanda la femme. — Oui madame. — Oui tante Lise ! — Oui tante Lise. »
Tante Lise ouvrit la porte d’un geste et entraîna la fée. À l’intérieur se tenait trois géants. Ils portaient une gagoule et un vêtement de cuir marron épais. Alignés les uns à côté des autres, les bras croisés, jambes écartés, deux petits trous dans la cagoule. Au fond de la pièce se trouvait une dalle grise en plastique. Tante Lise alongea la fée sur la dalle, et attacha à l’aide de cordes ses mains et ses pieds. La fée ne connaissait pas ce rituel d’une religion qu’elle ne connaissait pas. Elle avait imaginé le grand jour de sa vie comme une danse autour d’un poteau de couleurs vives et gaies, mais elle n’osa dire mot. Tante Lise remonta la robe légère de la fée au-dessus de sa taille et se plaça en face des géants.
Elle ordonna : « Numéro 1, niquez ! » Le premier géant obtempéra. Il niqua la fée à genoux sur la dalle. Un temps passa et Tante Lise ordonna : « Numéro 2, enculez ! » Le second géant, debout devant la dalle, souleva légèrement le postérieur de la fée et enfonça son sexe d’un coup dans l’anus de la fée. Ils s’activèrent en un rythme ennuyeux, un temps passa, et Tante Lise ordonna : « Numéro 3, irrumez ! » Le troisième géant, à genoux au-dessus de la tête de la fée, qu’il retenait dressée, enfonça son vit dans la bouche de la fée, pressa ses pouces sur ses joues pour qu’elle referme ses lèvres, et travailla à un lent va et vient. Tante Lise regarda la scène, se déplaçant pour bénéficier des meilleurs points de vue, sans dire mot, comme satisfaite de la besogne des géants.
Il s’écoula trois heures. La fée s’était complètement oubliée, abandonnée au travail des géants, et somnolait dans un demi-sommeil sans rêve. Les géants venaient à jouir. Un à un, ils se tournèrent vers Tante Lise et vidèrent dans sa bouche une abondante semance, qu’elle gouta jusqu’à la dernière goutte, après quoi elle détacha la fée, l’emmena dans sa chambre, et ne tarda pas à introduire son tout premier client.